L’interdiction aux mineurs d’une rétrospective de son œuvre, exposée depuis le 8 octobre au Musée d’Art Moderne de Paris, a créé la polémique. Le photographe, habitué à susciter la controverse, travaille depuis plus de 50 ans sur l’adolescence, sa violence, sa sexualité. Retour sur le parcours d’un artiste piqué à vif.
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De cette période provient sa passion pour les images, mais aussi son obsession pour l’adolescence. Et pour cause, la sienne fut catastrophique. « J’ai eu une adolescence de merde, confiait-il au Monde le 2 octobre. […] Je pensais que j’étais anormal. […] J’étais maigre, mon père ne m’aimait pas, il ne me parlait pas. »
Une adolescence de « camé »
Le jeune Larry sombre alors rapidement dans l’errance… et la drogue. A 16 ans, il découvre les amphétamines. Il s’y shoote tous les jours, trois ans durant. Comme il le raconte lui-même en 2006 : « à l’époque, j’étais camé, à tel point qu’il m’était très difficile de me concentrer et faire quelque chose qui réclame un minimum de minutie. »
C’est toutefois au sortir de cette époque qu’il réalise l’une de ses œuvres majeures. Après un passage par la Layton School of Art de Milwaukee, il revient à Tulsa en 1962 et photographie ses amis, perdus entre drogue, sexe et violence. Son leitmotiv est de montrer la vérité. Crûment. Celle d’une jeunesse américaine dont la société réfute l’existence. Ses photos sont rassemblées dans un ouvrage intitulé « Tulsa » et publié en 1971. Le recueil lui vaut son premier scandale avant de devenir une référence pour de nombreux photographes contemporains.
Toucher Scorsese et les enfants
Suivent d’autres livres de photos, toujours sur le thème des adolescents et de leur sexualité : Teenage Lust publié en 1983, puis 1992 (en 1992) et The Perfect Childhood l’année suivante. Sur sa lancée, il passe au cinéma et réalise en 1995 son premier film, Kids. Celui-ci rencontre un réel succès et se fait notamment remarquer au festival de Cannes. Son troisième long-métrage, Bully (2001), est présenté au festival de Venise. Ses œuvres explorent toujours le même thème et les polémiques se succèdent, parallèlement au succès : en 2002, son film Ken Park est censuré en France ainsi qu’au Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Australie.
Aujourd’hui, Larry Clark est par son œuvre un artiste reconnu et incontesté. Les metteurs en scène Martin Scorsese et Gus Van Sant ont dit admirer et avoir été influencé par son travail. Mais pour Larry Clark, le premier public, celui qui compte avant tout, ce sont ces jeunes qui le fascinent depuis tant d’années. Et l’artiste de conclure : « Les enfants aiment mon travail, il leur parle. Je trouve qu'on devrait faire le contraire, interdire l'expo aux plus de 18 ans ! »